Ethnotempos

La dame n’est pas bien haute et sa voix souvent bien fragile. Mais cela n’empêche en rien Sylvie BERGER d’être une géante de la chanson traditionnelle française et d’envoûter doucement les cœurs et les âmes avec son timbre vocal si particulier.

Son premier album au sein de LA BERGÈRE, Ouvarosa, sorti en 2002 avait déjà été un choc, une révélation, un torrent d’émotions. Et déjà ses deux complices étaient à ses côtés, Julien BIGET, guitare, bouzouki, claviers et chant, et Emmanuel PARISELLE, accordéon diatonique, flûte et chant. Car LA BERGÈRE est un trio, qu’on se le dise quoi qu’on en pense. Le deuxième album de la formation, Fi de l’eau, sortie en 2006, ne fit qu’enfoncer le clou et hissa LA BERGÈRE au rang de groupe désormais mythique en son genre.

Et voici maintenant le troisième opus, Étreintes, avec une Sylvie BERGER au sommet de son art, avec les deux mêmes complices toujours aussi extraordinaires sur leurs instruments, et avec même l’étincelant Gilles CHABENAT à la vielle à roue et le somptueux Yannick HARDOUIN à la basse. Étreintes est un album plutôt court, à peine 31 minutes 03 au compteur.

Cependant ce n’est la durée qui importe ici mais la qualité de l’opus. Et là, on est servi, et même royalement. Dix chansons, dix joyaux sans aucun défaut. L’album est sans conteste plus sombre que les précédents mais Sylvie BERGER ne fait en même temps que chanter les paroles de chansons venues d’une époque où les mœurs, notamment sexuelles, étaient encore plus rudes et crues qu’en ce présent moment où la condition des femmes laisse toujours énormément à désirer.

Toutefois, Étreintes n’est pas un album de combat ou simplement revendicateur. C’est juste un formidable album, le troisième, d’un groupe extraordinaire. Non, ces chansons ne passeront jamais à la radio ou à la télévision et en encore moins sur les dance-floors. Alors il faut acheter l’album pour en savourer la magie. Exceptionnel, intense et magnifique !
 
Frédéric Gerchambeau
http://www.rythmes-croises.org/ethnotempos/articles.item.947/la-bergere-etreintes.html
 
NOS ENCHANTEURS

La Bergère, folles mais traditionnelles étreintes !

Bien que nous soyons pas l’estimé Trad magazine, nous aimons, chaque fois que faire se peut, écouter et chroniquer le meilleur de la chanson traditionnelle. Sylvie Berger, dite La Bergère, émarge chaque fois dans la crème du trad’, qu’elle soit dans le cadre d’une formation (Roulez fillettes, Ambrozijn), avec Eric Montbel ou le jazzman Jean-Marc Padovani, ou sous son nom, avec ses habituels complices que sont Julien Biget (guitare, bouzouki, claviers et chant) et Emmanuel Pariselle (diatonique, flûte et chant) [sur ce présent album renforcés par Gilles Chabenat (vielle) et Yannick Hardouin (basse), ces deux derniers faisant partie de la nouvelle formation du groupe Malicorne].

Donc La Bergère. Troisième album après Ouvarosa en 2002 et Fi de l’eau en 2006, troisième superbe production. Dix chansons (pour 31 minutes, c’est peu…) toutes issues de la tradition, de Vendée et du Berry, Nivernais-Morvan, Bourbonnais et Bretagne, Auvergne et Acadie. Toutes sur la thématique de la chair, plaisirs et blessures…

Ça débute par une étonnante chanson, sans détours, sur une jeune couturière enceinte qui ne sait comment elle l’est devenue, n’ayant, le croirez vous, rien senti : dialogue croustillant entre mère et fille. Etreintes passées, présentes ou à venir, ce ne sont que des chansons, d’une crudité qui n’a d’égale que la naïveté, nous parlant d’enfantement, d’infanticide, de l’amant qui s’en va pour six ans au régiment, de celui qu’on met en pénitence, du galant qu’on va noyer, de la belle aimée qu’on va trucider… Rien de vraiment joyeux en fait mais c’est si bien dit, si bien chanté. Les chansons traditionnelles sont comme ces galets que les eaux et le temps ont travaillé : en reste de purs chefs d’oeuvre populaires que les paroliers de nos jours auraient du mal à égaler.

Signalons cette chanson vendéenne, Sur les quais du Havre, rêve maritime où la symbolique sexuelle crève les voiles : « A son joli réveil-le la belle s’est mise à dire / Qu’elle voudrait bien avoir un mât dans son navire. » De quoi, séance tenante, se faire au mieux marin, au pire mousse ! Notons aussi Les métamorphoses, dans la version jadis présentée par La Bamboche, composée de diverses versions, sur le disque Quitte Paris de 1977.

Voix claire, enchanteresse, de Sylvie Berger, qui sait faire dentelle sur les pires atrocités, admirablement et sobrement servie par ses complices musiciens. Il n’y a nul besoin d’être féru de chansons traditionnelles pour apprécier un tel travail : il suffit simplement d’aimer la chanson.
 
Michel Kemper (mai 2014)

 

COUV TRAD 154TRAD MAGAZINE

Huit ans d’attente pour ce troisième album du trio réuni autour de Sylvie Berger, et à peine la première écoute achevée qu’une insupportable sensation de manque m’étreint. L’album est comme toujours trop court, mais tellement beau : beauté des mélodies traditionnelles choisies (et pour certaines, étrangeté), ou composées pour deux d’entre elles. Poésie et originalité des textes pour l’essentiel puisés dans le corps de la tradition, efficacité, simplicité et sophistication des arrangements, et complémentarité des voix autour de celle, sensible et inimitable, de Sylvie Berger. Bref, « tout est bon chez elle, il n’y a rien à jeter, sur l’île déserte », comme dit l’ami George. Le trio est, comme pour les deux albums précédents, « Ouvarosa » (Le Roseau, 2002) et « Fi de l’eau » (le Roseau, 2006), formé de Sylvie Berger (chant), Emmanuel Pariselle (chant, accordéon, flûte) et Julien Biget (chant, guitare, bouzouki, clavier, direction artistique), rejoints pour deux titres par Gilles Chabenat (vielle à roue) et Yannick Hardouin (Basse). Un disque incontournable, à placer d’autorité entre toutes les oreilles.
 
François Saddi (n°154 MARS / AVRIL 2014)